Primitive
Emilie Ding (CH)

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  • (Photo: Annik Wetter)
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Emilie Ding (CH)

Primitive

January 21March 6, 2010  |  Evergreene (Geneva)

Pour sa première exposition personnelle à la galerie EVERGREENE, la jeune artiste Emilie Ding (1981) se saisit de l'espace avec densité.

Le public local attentif a déjà pu se confronter à ses imposants dessins géométriques, récemment présentés au Centre d'art contemporain de Genève à l'occasion du concours pour l'attribution des bourses Berthoud, Lissignol-Chevalier, Galland. Il a pu aussi voir émerger ses étranges structures de béton semblables à des éléments de soutènements, placées de manière incongrue dans les espaces d'expositions et ainsi rendues au statut de sculptures ou de hauts-reliefs (notamment à Forde en 2008).

Les sculptures d'Emilie Ding font, à chaque fois, indice de tensions... Leurs formes semblent ne provenir que de la copie d'éléments de génie civil, nécessaires à la contrainte de la nature. Les structures de bétons émaillant le paysage routier suisse, exercent une fascination sur la jeune artiste qui installe des éléments faussement structurels dans les espaces d'exposition.

Ainsi, l'imprévisibilité de la nature et sa puissance d'entropie sont transférés de manière métaphorique sur les lieux d'exposition. Ces sculptures se proposent de consolider les espaces qu'elles occupent. Elles révélent aussi que ces vides que représentent les espaces dédiés à l'art, sont pris dans de forts champs de forces cherchant à les réduire. Même consciente du caractère éphémère et de l'utilité tronquée de ses contreforts, points d'ancrage ou tirants, l'artiste va jusqu'à respecter le matériau d'usage : le béton armé.

Pour son exposition, à la galerie EVERGREENE, Emilie Ding a décidé de mettre l'accent sur son travail de dessin. Quatre compositions, aux proportions monumentales, encerclent l'espace. Les motifs réguliers qui rappellent les trames de bossage des façades, se déforment, sous les effets contraignants des perspectives. Les lignes de fuite se courbent, les profils s'évasent. Le visiteur est pris dans une capsule dont les murs sont renforcés et les fenêtre  calfeutrées. Les effets de mouvements  sont assez violents. L'expérience est physique. Ce ressenti est d'ailleurs amplifié lorsque nous imaginons la rigueur quasi- ascétique nécessaire à la réalisation de tels dessins.

La dureté du travail sert de métaphore à une installation. Sur le mur un trait brut de couleur rouge trace un horizon. Au sol, des traces sur une lourde barre métallique indique que celle-ci a servi de règle surdimensionnée. Sans affect, ni grandiloquence, le dispositif – tout comme les autres sculptures de l'artiste – fait le lien entre le travail de dessin et un faisceaux de références de l'histoire des formes liées à une pensée de la fin de l'ornement. Emilie Ding fait écho d'un monde dans lequel la géométrie est peut-être encore le support d'une pensée humaniste, mais celle-ci n'est plus le centre du système.

Samuel Gross